S’exprimant ce mois de décembre 2024 devant la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, lors de la défense de l’enveloppe budgétaire de l’État pour l’exercice 2025, le ministre délégué auprès du ministre de l’Économie a révélé que le gouvernement mène actuellement des «concertations avec certains partenaires au développement, à l’effet de relancer les capacités de production de certaines sociétés agro-industrielles».
Il s’agit notamment de la Société de développement du coton (Sodecoton) et de la Société d’expansion et de modernisation de la riziculture de Yagoua (Semry), deux unités agro-industrielles situées dans la partie septentrionale du Cameroun. Paul Tasong cite également la Cameroon Development Corporation (CDC), 2ᵉ employeur au Cameroun après l’administration centrale, et Pamol Plantations PLC. Ces deux entreprises sont situées dans la partie méridionale du pays.
Le membre du gouvernement, qui met ces démarches sur le compte de la mise en œuvre du Projet intégré d’import-substitution agropastoral et halieutique (Piisah), n’a pas révélé l’identité des partenaires auprès desquels l’État du Cameroun négocie les financements pour doper les capacités de production de ces unités agro-industrielles. L’on sait cependant que la Sodecoton, dont l’État détient 59% du capital, et qui encadre environ 200 000 producteurs, est depuis quelques années porteuse d’un programme d’augmentation de ses capacités opérationnelles. À travers notamment la construction de nouveaux magasins de stockage, une 11ᵉ usine d’égrenage du coton et une nouvelle huilerie. Tous ces investissements sont réalisés dans la perspective d’une hausse de la production de coton à 600 000 tonnes à l’horizon 2030, contre environ 350 000 actuellement.
La CDC et Pamol Plantations, dont l’État détient 100% du capital, sont quant à elles dans une mauvaise passe depuis le déclenchement de la crise socio-politique, qui secoue les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun depuis fin 2016. En 2019, par exemple, Pamol Plantations Plc, qui exploite le palmier à huile dans la région du Sud-Ouest du Cameroun, déplorait une perte globale de 40 milliards de FCFA depuis le déclenchement des revendications séparatistes dans les deux régions anglophones du pays. En effet, cette entreprise avait dû arrêter ses activités, en raison du durcissement des affrontements entre l’armée régulière et les militants sécessionnistes.
35 milliards de FCFA d’arriérés de salaires
Cette crise a mis un coup de frein au vaste programme d’investissements implémenté, depuis 2015, au sein de l’entreprise. Ce programme prévoit notamment l’acquisition d’une unité de production d’huile de palme, d’une capacité de 30 TM par heure. Il est également prévu la construction d’une savonnerie et l’extension des plantations de l’entreprise sur une superficie de 500 hectares dans la presqu’île de Bakassi.
La CDC, qui exploite le palmier à huile, la banane et l’hévéa dans les régions du Sud-Ouest et du Littoral, subi également les conséquences de la crise dite anglophone. Elle a par ailleurs dû arrêter ses activités à un moment, ses plantations ayant été transformées en camps entraînement par les militants séparatistes. Entre 2019 et 2021, l’entreprise a cumulé des pertes de 38,7 milliards de FCFA, selon les données de la Commission de réhabilitation des entreprises du secteur public et para-public, organisme spécialisé du ministère des Finances, dont les activités viennent d’être reversées à la Société nationale d’investissements (SNI) réformée.
Malgré la reprise des activités en 2020, et la perte d’environ 5000 emplois sur 22 000, la CDC totalise 35 milliards de FCFA d’arriérés de salaires à fin juin 2023, ainsi qu’une dette sociale vis-à-vis de la CNPS (le fonds de pension public, NDLR) de 26,7 milliards de FCFA, selon la CTR. En 2019, cette société d’État estimait déjà ses besoins de financements à 29 milliards de FCFA, pour pouvoir relancer ses activités de façon optimale.
La Semry, qui encadre environ 20 000 riziculteurs dans la partie septentrionale du Cameroun produit annuellement à peine 100 000 tonnes de riz, alors que les importations du Cameroun atteignent souvent 800 000 tonnes. Au sortir d’un conseil d’administration début 2024, les dirigeants de cette entreprise publique projetaient une production de à 180 000 tonnes en 2024, comptant principalement sur l’appui du ministère de l’Agriculture et du Développement urbain (Minader). Ceci, à travers le Projet d’aménagement et de valorisation des investissements de la vallée du Logone (Viva Logone), financé par la Banque mondiale.
Source: Investir au Caameroon